Many Americans think California is outside the US, but it became a State in 1850.
We enjoy it.
California, like many immigrants, came to the US long after it was created - bringing new ideas and a better climate.
My greatgrandmother was so impressed by her holiday in Hollywood in 1911 that she built a home and she and the kids never returned to Europe. .
This is the the transcription of the letter her husband wrote her, protesting the fact that his children would be brought up as 'foreigners in a foreign land. Since you too are a foreigner, I'll point out it's mostly written in French. The Russian has become question marks in Silicon Investor .
12 / 25 Décembre, 1912
?????? ??????? 11
Chère Lota,
Ta carte vient de me parvenir, j’y réponds de suite. Evidemment de si loin je ne puis suivre la santé des enfants [ii], ni même donner des conseils, car je ne connais ni le climat ni les conditions d’existence, ni les médecins et leurs habitudes, de la Californie. En général, la paralyse infantile est une mauvaise maladie, dont on connait très peu ; la forme épidémique atteint surtout les méninges ; c’est une méningite aigue, qui commence souvent par l’inflammation des lymphatiques de la gorge et du nez, rhume, angine, fièvre des foins etc. En cas d’épidémie, il faut donc faire attention à ces petites inflammations locales et les traiter en conséquence ; éviter les endroits poussiéreux, rester à la maison, au lit, prendre un purgatif, du thé de tilleul ou autre, prendre de l’aspirine, ou du salicylate de Na. Il faut évidemment s’isoler autant qu’il est possible des malades. Le traitement de la maladie elle même est symptomatique et pour cette raison compliqué, mais en général il se réduit à l’application de glace sur la tête, application parfois de sangsues derrière les oreilles, administration de salicylate de Na à l’intérieur, de calmants (morphine, bromures etc.), si la faiblesse est grande, on donne de la cafféine et de la strychnine. S’il y a rétention d’urine il faut pratiquer le sondage ; en cas de constipation faire des clysmes ou donner des purgatifs doux (pulvis Rhei, pulvis ligmintiae composite, extractum fluidum, Cassaroe Lagradae, compote avec quelques feuilles de Lemise ou avec aneliandpuetrei [???] même). La maladie dure de 4-6 semaines. La forme sporadique de paralysie infantile se soigne de même ; elle est moins épidémique ; mais elle atteint la substance du cerveau et de la moelle, laissant après elle des paralysies étendues, comme chez Cubeper, tu te souviens.
Je suis si loin de vous, que je me suis absolument séparé, absolument impuissant à vous porter secours en cas de nécessité, comme à en recevoir de vous s’il le fallait. Ces derniers temps, Lota, j’ai des hauts et des bas épouvantables ; mon amour pour toi ne veut pas et ne peut pas me quitter. Je t’ai cependant écrit ma dernière lettre en pleine conscience ; je n’en puis plus de ma solitude surtout sous l’inculpation de misérable, de canaille, de cochon et d’alphonse [iii]. Que ferions-nous de nouveau ensemble si tu recommence à insulter mes aïeuls [iv], ma famille et ma mère ? A quoi serais-je bon sous tes continuels soupçons avec sa jalousie affreuse ? Chaque parole que je dis n’est que mensonge, n’est-ce pas ? Aussi il vaut mieux de séparer pour de bon ; tu étais pour moi l’idéal de la femme, fine, élégante, intelligente, ayant la compréhension nette du bon et du mal, du beau et du laid ; mais il est préférable de se quitter ; car moi je t’empêcherais de faire paraitre tes qualités délicieuses et toi, tu m’empêchais complètement dans mon évolution, dans l’élargissement de la force de ma compréhension.
14 XII
Je me suis arrêté dans ma lettre, parce qu’il m’est trop pénible de t’écrire ; pour t’écrire il faut, que je pense à toi, tandis que en général j’essaie de m’enivrer d’autre chose, d’autres pensées ; Lolotina chérie, adorée, tu entends mes sanglots ; ils te disent adieu ; je te quitte Lota avec un déchirement du cœur ; je suis éperdu et ma cervelle se brise. Tu m’écris dans la carte cher Pierre et tu finis : nous t’embrassons ; je ne suis donc pas un cochon, un vaurien de menteur, un alphonse qui se vent. Les enfants grandiront dans ce pays étranger et dans leur curiosité ils chercheront leur père ; où est-ce qu’ils le trouveront ? Je serai un étranger pour eux comme je le suis presque déjà maintenant ; ils auront des goûts américains que j’ignore. Seul le petit Sousousia [v] ne me quitte pas ; parfois la nuit il vient vers son père et je le caresse tendrement ; mais le matin il n’est plus là ; paisible et résigné je dis à son image : ne perd pas patience , je viendrai un jour ou l’autre te tenir compagnie dans les espaces immenses ; parfois au contraire il me semble qu’il réapparaît dans les autres enfants. Je ne puis admettre le matérialisme absolu et je crois que son âme enfantine ne peut se perdre et reviendra sur la terre.
_____________
Après une lourde nuit j’ai la tête endolorie, je voudrais écrire et écrire encore, mais à quoi bon ? mes mots sont des mensonges ; un jour tu retireras mes lettres et sous mes yeux étonnés tu me démontreras toute mon hypocrisie et ma malhonnêteté. Il vaut mieux se taire, ainsi il n’y aura ni l’une ni l’autre. Oui, chérie, la séparation est atroce, elle me donne une blessure dont je ne guérirai pas facilement, mais je crois que pour toi et pour moi elle est, si je ne me trompe, nécessaire. Quand tu auras quelque chose à me demander, écris-moi ; c’est pour moi un soulagement de te répondre, quoique la réponse ne t’arrive qu’en 6 semaines. Cette lettre sera expédiée à l’adresse de Hollywood ; dis-moi vite votre nouvelle adresse, car au commencement de notre août j’aurai rassemblé 600 roubles pour vous ; mais je ne désire pas les envoyer à une adresse peu sûre.
Embrasse les enfants bien fort, qu’ils grandissent et deviennent les dignes enfants de leur mère, et toi Lota ____
Je n’en peux plus
Pierre
Au présent, la rue s’appelle Sadovaya-Triumfalnaya, un segment du cercle ‘Sadovaya’. Elle est un de plusieurs circuits qui encercle le centre du Moscou, le Kremlin, et sans doute le plus utilisé.
[ii] Il est bien possible, même probable, que le malade était Konstantin, car il disais autrefois qu’il était faible et gravement malade dans sa jeunesse ; selon lui, il a frisé la mort. Ça veut dire que la maladie pourrait avoir été Polio. (Seul une minorité des malades de Polio souffre de la paralysie permanente . Et quelques-uns meurent de Polio, comme par exemple la sœur cadette de Lota, Alexandra, dite ‘Soucha’, à 12 ans.)
[iii] « Alphonse : Homme entretenu par sa maîtresse (argot, fin 19e siècle) »
[iv] Lota avait l’habitude d’ajouter le nom ‘soûlard’ à chaque instance de référence à A.I. Herzen. L’origine de cette attitude, de cette antipathie, est inconnue.
[v] Nous croyons que ce mot vient du mot en russe sousoukat ????????, zézayer , et fait référence d’un quatrième enfant, Vladimir, qui est mort à 2 ou 3 ans, en 1905 ou 1906 (et qui évidemment zézayait). |